Ceija Stojka a survécu à trois camps de concentration lorsqu’elle était Rom. Vers l’âge de 50 ans, elle a commencé à peindre ses traumatismes. Elle l’a fait secrètement entre deux épluchages de pommes de terre, sans le soutien de sa famille. Les gouaches colorées, qu’elle appelait Helle Bilder, pétillent d’amour pour la vie. Elle était donc une force vitale. Dans des couleurs vives, les peintures sans prétention dépeignent la vie idyllique des gitans (avant la guerre). Le style spontané et naïf, le souci du détail et l’attention portée au paysage sont caractéristiques. Après les vignobles, les champs et les champs de citrouilles des gouaches de Ceija Stojka, vous pénétrerez bientôt dans les champs de St Catharinadal. L’artiste avait de nombreux talents. Les deux chants traditionnels roms que l’on entend ici parlent d’un cœur à l’autre.

Les gouaches sombres, les Dunkle Bilder, dépeignent les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Elles sont expressives, parfois crues et esquissées. Le génocide ou Porajmos (dévoration) en romani est dépeint à travers la moelle. De sa famille, qui comptait environ 200 personnes, seules six ont survécu au génocide perpétré par les nationaux-socialistes. Cela nous rappelle les génocides actuels. Profondément croyante, Ceija Stojka a dû sa survie au camp en partie à la Vierge Marie. Sur deux gouaches de cette procession, elle a peint une chapelle mariale. Cette autodidacte a appris à lire et à écrire et a publié plusieurs livres et recueils de poèmes sur ses expériences de la guerre. Elle fut l’une des premières Roms à rendre publique son histoire.

La participation de Ceija Stojka à A Deeper Shade of Soul met également en lumière une micro-histoire locale. Le terrain sur lequel l’abbaye de St Paul a été construite était à l’origine une halte pour les caravaniers. Avec la construction de l’abbaye vers 1906, le campement s’est légèrement déplacé. Jusqu’à la dissolution du camp dans les années 1970, les frères et les Roms étaient de bons voisins et se rendaient régulièrement visite.